B.R.M.C. Le Bien Incarné
San Francisco est peut être l’une des Mecques les plus actives du Garage à tendance psychédélique de ces dernières décennies, un saint lieu du genre qui laisse peu de place à la redondance et la perdition, Cela n’a pourtant pas empêché les Black Rebel Motorcycle Club d’y faire vrombir leurs mécaniques depuis près de vingt ans sur des virages Rock pas toujours ma^trisés et des accordages aussi ouverts que l’état doré, quitte à se perdre en cours de route.
Nombreux semblent l’oublier mais entre passages Americana à l’harmonica et dégazages de riffs rocailleux, l’essence même et la naissance du mythe B.R.M.C. gravite bien autour de la scène psyché et de l’ami Newcombe que du Gang imaginaire de Brando. Un univers Shoegazien dont s’extirpe petit à petit depuis l’arrivée de leur nouvelle batteur pour s’orienter vers des lignes toutes aussi noires mais plus mélodiques comme le prouve le tout frais Wrong Creatures, le dernier album en date paru ce 12 Janvier.
3ème passage ce soir pour le B.R.M.C. dans la salle Strasbourgeoise, une fois de plus Sold-Out un dimanche soir. Sans rencontrer le succès de genre comme peuvent jouir par exemple les Black Keys depuis quelques années suite à la parution du très bon mais nonobstant Add-Friendly El Camino. B.R.M.C. n’a quant à lui pas réellement pu capitaliser un succès public suite à la sortie de son 6ème Album, Beat The Devil’s Tatoo à l’époque. Loin d’être une tête d’affiche, le groupe s’il a su garder sa base de fan quitte à en perdre une partie en cours de chemin, à toujours sur garder une certaine intégrité et le « respect » du milieu musical et critique. Une forme de cocon de cuir empêchant de rendre vulnérable ce groupe. La critique étant d’autant plus difficile lorsque l’on connaît l’efficacité scénique du trio. Si les albums s’enchaînent et ne se ressemblent pas forcément pour un bien, les quelques perles distillées sur chaque nouvelles galettes viennent entretenir depuis des années la Set-List du groupe qui est aujourd’hui leur véritable force. Une réputation de bouche à oreille qui forge le mythe du trio, ils ne sont ni les rois du streaming, même pas les Middle Names de choix dans les festivals mais remplissent les salles obscures comme personnes. Voir et revoir le B.R.M.C sans faillir.
Typiquement ce genre de groupe phare, inclassable et habitué des citations post-génériques de films et séries plus ou moins d’actualités. Inconnu au bataillon du grand public sur le papier, mettez donc le single de Beat The Devil’s Tatoo à votre auditeur profane et sa réaction sera similaire à celle inspirée par l’écoute d’un Lonely Boy. « Ah, mais je connais ça ! J’aime bien! » Voilà, la vrai réponse. Que vous soyez un curieux du genre ou un nostalgique de la période Howl, difficile de ne pas fédérer le chalan derrière la qualité du produit fini B.R.M.C. C’est aussi cette convergence d’un public curieux, passionné, de fans et de profanes se massant pour prendre la claque attendue, qui ajoute cette dernière pincée de sel nécessaire à la réussite scénique du groupe. Une claque systématique, une satisfaction pandémique.
Comme à l’accoutumée, on retrouve sur scène Peter Haynes sur la droite, au chant et à la guitare avec à de multiples reprises, un harmonica au bec. Leah Shapiro depuis quelques années déjà derrière les fûts, en position centrale séparant les deux monstres. Enfin Robert Turner à la basse et lui aussi au chant sur la gauche de la scène. Côté scénographie, si le trio n’est pas bien épais, la scène est tout de même largement remplie avec les racks de Peter et des multiples baffles et têtes d’amplis se cachant derrière le trésor de pédales aux pieds des deux. Côté son et lumière, pas d’écran et fort heureusement, ce serait pêché ici. Le groupe bénéficie cependant de nouvelles colonnes de diffusion à LED qui distribue une source lumineuse tirant souvent selon le besoin de la piste interprétée, un plus discret mais pas essentiel pour ce genre musical.
Un plaisir que de revoir ces blousons noirs à la Laiterie et en teaser vivant d’un nouvel album qui sent bon le pneu chauffé à blanc. Largement inspiré par le roster anglais du label Creation a qui l’on doit des mastodontes du mouvement Shoegaze des années 90s, on peut largement retracé l’origine sonore du groupe à cette découverte importante et qui marquera pour Haynes et Robert la recherche du son, la maîtrise d’une cheville avisée aussi bien qu’un poignet ferme ou la guitare ne fait pas tout. Cette équipée sauvage se décrit aussi par une interprétation d’un blues profondément charbonneux voir poisseux. Les voix torturés et rocailleuses des deux frontmans se font échos et sont bien souvent difficilement distinguables une fois les yeux fermés. Si le set de 2014 était jouissif et brouillon donc garage, nous ne nous attendions pas une telle claque. Ou en tous cas nous en avions perdu la bonne habitude.
Ain’t No Easy Way embarque le public avec sa vague d’harmonica dépaysante et sincère, enchainement
Démarrage dans le flou avec la présentation de Little Thing Gone Wild, un des singles du nouvel album et déjà bien encré dans les écoutilles du public. Un début de Set grumeleux qui s’améliorera au fil des pistes. Une prestation sonore sans comparaison aucune avec celle de leur dernière passage quelques années plus tôt dans cette même salle. Plus carré, plus propre sans perdre cette essence garage boueuse à souhait, B.R.M.C. s’il n’a jamais déçu son public, semble encore avoir gagné en maturité et en professionnalisme dans la gestion de ses prestations scéniques. Les voix sont claires et hantées et chaque membres dispose d’un spectre sonore largement distinguable. Beat The Devil’s Tatoo, le tube current-gen du groupe confirmera notre ressenti.
Ain’t No Easy Way embarque le public avec sa vague d’harmonica dépaysante et sincère, enchainement osé avec le tout frais titre King Of Bones bien plus profond et noir avec cette ritournelle mineur. L’occasion de retrouver un PBO de Synthétiseur des plus agréables. Si dans les derniers albums ceux-ci sont omniprésents et rajoutent une backline mélodique parfois linéaire, ces pistes apportent une tension supplémentaire aux trois instruments déjà torturés.
Berlin, Conscience Killer, Haunt s’enchaîne et le public ne freinera à aucun moment. Une audience respectueuse mais vivante, surprenante parfois même. B.R.M.C. donne, beaucoup, tente, parfois trop et délivre des shows à la hauteur de leur spectateur. Et c’est un marathon sans concession qu’ils livreront à la laiterie. Comme le Racing poussé par ses fans, la France a toujours su bien accueillir le groupe, qui le lui rends plutôt bien.
Les pistes s’enchaînent et le groupe démarre une courte discussion avec son audience, peu bavard mais ravis d’être là. Robert n’est pas dans le mood mais promet de tout donner. Lui aussi se perds, nous aussi, les tracks continuent à fumer, le moteur, la moquette, tout vole au vent. Combien de chansons sont déjà passé dans nos oreilles, 10, 15 merde déjà 20 ?! C’était trop court bordel.
Six Barrel Shotgun l’instant classic et la piqure avant le rappel avec Spread Your Love la pépite psyché first-era, quelle baffe encore une fois. Tout aurait pu s’arrêter là, et nous aurions déjà passé une excellente soirée avec une Set-List 5 étoiles, mais non…
Final exutoire sur Rival qui est devenu à la surprise générale l’une des pistes phares malgré le succès mitigé de Specter At The Feast et clotûre en beauté sur le hit « first era » Whatever Happened To My Rock ‘n’ Roll (punk song). Un peu plus de deux heures d’un concert dantesque retraçant l’intégralité d’une carrière capricieuse mais déroutante dans tous les bon sens du terme.
Une belle avant première du prochain album à paraître en Janvier Wrong Créatures avec 5 tracks dont le dernier single Question Of Faith. Une part belle au culte B.R.M.C. et Take Them On, On Your Own avec 4 pistes chacun. Décidément on approche de la set-list parfaite. Ne manquait plus qu’une version complète de Loose Yourself au grand dam de ce fan obstiné presque assouvi par le fan service du BRMC qui ne peut décidément rien refuser au public Strasbourgeois qui le lui rends si bien. B.R.M.C. est plus que la claque annoncé, une drogue à proscrire aux depressifs du Rock et ils sont nombreux.
On aimerait bien revoir le groupe cet été en France dans nos festivals préférés… Les Eurockéennes tu es là ?
La setlist folle :
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Little Thing Gone Wild
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Bandung Hum
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Beat the Devil’s Tattoo
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Ain’t No Easy Way
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King of Bones
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Berlin
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Conscience Killer
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Haunt
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Question of Faith
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White Palms
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Stop
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Carried From the Star
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(Robert solo)
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Complicated Situation
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Shuffle Your Feet
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666 Conducer
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In Like the Rose
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Shade of Blue
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Six Barrel Shotgun
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Spread Your Love
Rappel :
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Red Eyes and Tears
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Rival
- Loose Yourself intro (remercions ce fan obstiné)
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Whatever Happened to My Rock ‘n’ Roll (Punk Song)